D'après « Contes à rire ou Récréations françaises », édition de 1788
Un des plus grands voleurs du Pays fut un jour pris par les archers du Prévôt qui l’emmenèrent devant lui, lui disant : « Monsieur, voici ce grand voleur que nous vous amenons, qui a fait tels et tels vols en tels lieux, et à tels. »
Ce voleur répond : « J'ai bien fait pis, Monsieur. — Il est vrai, repartit un de ces archers, c'est lui qui vola et assassina un tel. » Il répond encore : « J'ai bien fait pis, Monsieur. » Les autres contant encore d'autres vols et d'autres assassinats, celui-ci répondait toujours : « J'ai bien sait pis. » Le Prévôt lui demandant ce qu'il avait fait, il dit : « Je me suis laissé prendre. »
Comme il eut entendu prononcer son arrêt de condamnation à être pendu et étranglé, il dit : « Monsieur, s'il faut pendre tous les voleurs, il y a longtemps que vous devriez l'être. — Comment, répliqua le Prévôt ? — Parce que, dit le voleur, tous les Prévôts le sont, et que les lettres de leur nom ne chantent autre chose. P, veut dire prend ; R, veut dire rafle ; E, emporte ; V, vole ; O, ôte ; S, serre ; T, tire ou tout. »
Mais ce discours n'empêcha pas que ce pauvre diable ne passât le pas, tant les voleurs haïssent ceux qui leur ressemblent, afin qu'étant seuls, leur part de larcin soit plus grande.