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20 juillet 2014 7 20 /07 /juillet /2014 08:55

D'après « La Petite revue », paru en 1864

 

Dans les années 1860, toutes les personnes ayant l'habitude de visiter les expositions de peinture d'Eugène Delacroix, étaient assurées de rencontrer devant les toiles un certain Monsieur L. qui, depuis plus de vingt ans, avait juré de poursuivre à outrance notre grand peintre.

 

Voici comment cette haine lui est venue. En 1840, arrivant de Bordeaux, Monsieur L. courut chez Delacroix pour lui présenter ses études. Celui-ci, qui n'était pas toujours d'un abord facile, le reçut mal. Notre homme furieux voulut s'en venger depuis, en essayant de détruire la réputation de Delacroix, dont la mort même (13 août 1863) n'avait pu le calmer.

 

Chasse aux lions, d'Eugène Delacroix

 

En 1864, on avait exposé à l'hôtel Drouot la Chasse aux lions. Monsieur L. se garda bien de manquer cette aubaine. D'un bout de la salle à l'autre, on entendait sa voix nasillarde répétant ses critiques d'il y a vingt ans : — C'est de la peinture, ça !... Allons donc ! ce n'est ni peint, ni dessiné. — Ces bras sont trop maigres.— Ce paysage n'est pas le paysage africain.— Je la connais l'Afrique, moi ! — Ces lions sont estropiés, — les têtes ne sont pas emmanchées...

 

Tout le monde haussait les épaules, lorsqu'un artiste bien connu, moins patient que la foule, s'approcha du vieux rapin, et le prenant par le bras, lui dit : « Et la vôtre de tête, la croyez-vous bien emmanchée ? » Le critique devint d'un rouge pourpre, car sa taille état fort déviée. Il voulut répondre, mais les huées et les éclats de rire de la foule l'en empêchèrent, et il fut forcé de quitter la salle.

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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 08:55

D'après « La Mosaïque », paru en 1879

 

En 1876, le journaliste et romancier populaire Camille Debans, publiait au sein d’un recueil un curieux acrostiche, où chaque lettre de l'alphabet forme la finale du vers. Grâce à la souplesse de son talent, il avait pu accomplir ce tour de force sans donner le moindre croc-en-jambe au bon sens, à la grammaire et à la prosodie.

 

C'est l'histoire de nos premiers parents, suivie de réflexions morales, qui a fait les frais de cette originalité poétique. Nous disons poétique, mais non rimée, par cette simple raison que la succession des lettres de l'alphabet exclut la rime et condamne le versificateur aux vers blancs.

 

 

Voici la plaisante élucubration de Camille Debans :

 

Quand Adam fut créé, tout seul il s'ennuy A

Dans de vagues pensées trop souvent absor B

Il suppliait son Dieu de les faire ces C

Dieu crut à ses désirs devoir enfin cé D

L'homme en fut pour sa côte ; Eve alors fut créé E

Eve était séduisante et belle au premier che F

Depuis la création sa race a peu chan G

De plaire et de séduire elle s'est fait la t H

A force de s'aimer le monde s'arrond I

L'amour, ce doux plaisir, cette douce ma J

Ne donnait que bonheur et jamais de tra K

La femme était constante et le mari fid L

Que faire ? Ils étaient seuls; il faut bien que l'on s'M

Pas de rivaux d'amour, pas d'ennui, pas de N

Oh ! c'était le bon temps du plaisir, du rep O

Tandis que, de nos jours, on voit l'homme occu P

Courbé sous le destin, par le besoin vain Q

Et pour qui le travail, devenu néces R

S'assied à son chevet, le poursuivant sans c S

Eh ! bien, soit ; travaillons, et vive la gai T

Que jamais le chagrin ne nous trouve abatt U

J'ai vu soixante hivers ; je crois avoir trou V

Des amis que je tiens en réserve au beau f X

Je crois à ce bonheur ; comme moi, croyez- Y

Et qu'un Dieu protecteur nous soutienne et nous Z

 

Note : Autrefois la lettre W n’entrait pas dans notre alphabet. Il faut attendre la 7e édition du Dictionnaire de l’Académie française (1878) pour y voir une section consacrée à part entière au W, la lettre étant ainsi définie : « Lettre consonne qui appartient à l’alphabet de plusieurs peuples du Nord et qu’on emploie en français pour écrire un certain nombre de mots empruntés aux langues de ces peuples, mais sans en faire une lettre de plus dans notre alphabet. »

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6 juillet 2014 7 06 /07 /juillet /2014 08:55

Extrait de «La maladie du siècle », édition de 1856

 

Au milieu du XIXe siècle, l'avocat Emile Crozat publiait La maladie du siècle ou les suites funestes du déclassement social : « aux séduisantes illusions d'une existence imaginaire, opposez, il le faut, les désenchantements pénibles, mais quelquefois salutaires de la vie réelle », y écrit-il.

 

Il enjoint ceux de ces lecteurs croisant un homme de la campagne attiré par la lumière des villes, d'adopter la démarche suivante pour l'en dissuader : « Etablissez une effrayante comparaison entre ce qu'il quitte et ce qu'il poursuit. Parlez-lui de l'air pur qu'il dédaigne, des sentiers fleuris qu'il abandonne pour l'air empesté de l'impasse boueuse qu'il habitera. Parlez-lui de la mansarde et de la chaumière, rappelez-lui l'eau claire de son ruisseau, et la piquette salutaire qu'il échangera contre le vin frelaté de la hideuse taverne, de la dégoûtante gargotte. Comparez la nourriture grossière, il est vrai, mais abondante et saine, qui ne lui a jamais manqué avec ces ratatouilles ignobles dont chaque bouchée lui coûtera quatorze heures de sueur, car il ne s'agira plus comme à la campagne, lorsque le maître tourne le talon, de regarder de quel côté vient le vent.

 

 

« A la ville, pour courber le travailleur sous la glèbe, il y a pire qu'un maître, il y a des contre-maîtres. Indolent bouvier, nonchalant berger, il ne s'agit plus maintenant de journées tronquées mais de journées complètes ; et encore n'en obtient pas qui veut. Et lorsque la production dépassera la consommation, lorsque la fabrique chômera, lorsque le besoin de bras et d'épaules se restreindra, que deviendras-tu au milieu de cet essaim affamé dont le bourdonnement retentit depuis Lyon jusqu'à Manchester, depuis Londres jusqu'à Paris?... Et si tu échappes à la faim, aux balles et aux boulets de l'ordre public, échapperas-tu au bagne et à la prison ? Et en revenant de subir ta peine, ne seras-tu pas obligé, partout montré au doigt par le stigmate de la surveillance, d'opter entre le métier de mendiant et de voleur ?

 

« Dans ton village, aux jours de crises alimentaires, sans façon et sans humiliation surtout, tu aurais pu t'asseoir à la table de l'un, te reposer sur la paille hospitalière de l'autre ; à la campagne, cela ne tire pas à conséquence ; à la ville, tu n'auras pas, si l'eau se vend, un verre d'eau pour rafraîchir ta langue desséchée, une pierre pour reposer ta tête, car la police te disputera jusqu'à la borne du chemin. Et sur le soir de la vie, invalide sans hôtel, vétéran sans retraite, vieux vagabond sans asile, le brancard de la salubrité publique te ramassera au fond de quelque cul-de-sac pour te livrer aux expériences médicales d'un amphithéâtre où ton pauvre chien lui-même ne t'accompagnera pas, car il aura fini de souffrir avant toi. Serais-tu allé ainsi à l'humble cimetière de ton hameau ? »

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29 juin 2014 7 29 /06 /juin /2014 08:55

D'après « Encyclopédiana : recueil d'anecdotes anciennes, modernes et contemporaines », édition de 1857

 

Boileau-Despréaux (1636-1711), Racine (1639-1699), La Fontaine (1621-1695), Furetière (1619-1688), Claude-Emmanuel Lhuillier dit Chapelle (1626-1686) et quelques autres beaux-esprits de leur société avaient adopté une maison où ils se rassemblaient souvent.  On y était convenu d’infliger une peine à celui des sociétaires qui commettrait une faute soit contre la pureté de la langue, soit contre la justesse du raisonnement.

 

 

Pour cela, on avait eu soin de poser sur la table de l’assemblée un exemplaire, qu’on y laissait toujours, de La Pucelle ou la France délivrée, grand poème épique de Jean Chapelain dont les 12 premiers chants, parus en 1656, avaient suscité la consternation générale, au point que les douze derniers chants ne furent pas imprimés.

 

Le délinquant était jugé à la pluralité des voix, et la peine ordinaire qu’on lui infligeait était le lire un certain nombre de vers de ce poème. Quand la faute était considérable, il était condamné à en lire davantage ; mais il fallait que sa faute fût énorme pour qu’on lui infligeât d’en lire une page entière.

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22 juin 2014 7 22 /06 /juin /2014 08:55

D'après « Le Petit méridional », paru en 1899

 

En 1899, les papeteries françaises s'apprêtaient à lutter contre une concurrence anglaise qui s'annonçait dangereuse en raison de l'avènement du papier d'herbe, obtenu par le procédé ordinaire (lavage à l'eau, traitement par une lessive de soude chaude, nouveau lavage et mise en pâte dans les cuves).

 

Toutes les variétés d'herbes les plus communes peuvent être employées dans la fabrication très simple, peu coûteuse et amenée à prendre un grand développement, de ce nouveau papier. Il convient seulement, quand on destine les herbes à cet emploi, de les récolter avant qu'elles commencent à fleurir, nous apprend-on.

 

 

La fibre du papier ainsi produite est très longue, sa ténacité et sa souplesse sont remarquables. Ces qualités permettent de se servir de cette pulpe pour fabriquer du papier-toile, du papier à dessiner, à écrire, à calquer, parce qu'elle fournit une surface fine et lisse d'une grande transparence.

 

On est alors parvenu à calculer qu'un kilogramme de gazon sec produisait un quart de son poids de papier. En d'autres termes, on arrive à démontrer qu'un hectare de terrain planté en gazon peut fournir en moyenne 2,5 tonnes de papier.

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15 juin 2014 7 15 /06 /juin /2014 08:55

D'après « Mémoires, souvenirs et anecdotes sur la Révolution de 1789, le Directoire, le Consulat, l'Empire, etc. » (Tome 3) paru en 1837

 

Au commencement de la Restauration, Louis XVIII visitait, dans ses promenades, les villages des environs de Paris.

 

Le maire d'un des plus jolis hameaux de la vallée de Montmorency, regrettant beaucoup de n'avoir pas encore vu le roi, et attribuant cette contrariété à la position topographique de son endroit, situé sur un des points les plus élevés de la vallée, prit le parti d'écrire à Louis XVIII pour le supplier de ne pas priver de sa présence ses fidèles sujets.

 

Louis XVIII

 

Voici la lettre textuellement copiée sur l'original :

 

« Sire,

 

« Nous savons que Votre Majesté procure souvent » aux populations qui avoisinent la capitale le bonheur de la voir. Notre petite commune est tout au plus à quatre lieues de Paris, et cependant nous n'avons pas encore pu contempler les traits chéris du meilleur des rois.

 

« On a peut-être dit à Votre Majesté qu'il est difficile d'arriver chez nous ? On vous trompe, Sire : les ânes montent avec la plus grande facilité. D'après cela, nous espérons vous voir bientôt, et, dans cette attente, j'ai l'honneur d'être, etc. »

 

Louis XVIII rit aux éclats en lisant cette lettre. Il voulut voir l'excellent maire qui l'avait écrite. Il ne tarda pas à combler ses vœux, et gravit, sans le secours des ânes, la montagne à pic, habitée par des sujets fidèles et par un administrateur plus dévoué que spirituel.

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1 juin 2014 7 01 /06 /juin /2014 08:55

D’après « Anecdotes relatives à quelques personnes, et à plusieurs événements de la Révolution », édition de 1820

 

Ancien membre du Comité de sûreté générale sous la Révolution et chargé en cette qualité de la police de Paris pendant quelque temps, Jean-Baptiste Harmand rapporte un fait singulier dans ses Anecdotes relatives à la Révolution (le récit fut censuré en 1814, année de la première édition, et figurera dans l’édition de 1820).

 

Une demoiselle jeune, grande et bien faite, s'était refusée aux recherches de Louis de Saint-Just, surnommé, l’Archange de la Terreur, député de l'Aisne élu à 25 ans en 1792 et soutien indéfectible de Robespierre (il sera guillotiné le même jour que ce dernier, le 28 juillet 1794). Saint-Just la fit conduire à l'échafaud. Après l'exécution, il voulut qu'on lui représentât le cadavre, et que la peau fût levée. Quand ces odieux outrages furent commis, il la fit préparer par un chamoiseur et la porta en culotte.

 

Louis de Saint-Just

 

Je tiens ce fait révoltant de celui même qui a été chargé de tous les préparatifs et qui a satisfait le monstre, poursuit Harmand ; il me l'a raconté, avec des détails accessoires que je ne peux pas répéter, dans mon cabinet au Comité de sûreté générale, en présence de deux autres personnes qui vivent encore.

 

Il y a plus : c'est que d'après ce fait, d'autres monstres, à l'exemple de Saint-Just, s'occupèrent des moyens d'utiliser la peau des morts, et de la mettre dans le commerce. Ce dernier fait est encore constant. Il ne l'est pas moins que, il y a environ trois ans, on mit aussi dans le commerce de l'huile tirée des cadavres humains : on la vendait pour la lampe des émailleurs.

 

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25 mai 2014 7 25 /05 /mai /2014 08:55

D'après « L'Improvisateur français », paru en 1804

 

Egaré dans une forêt du Vermandois, Henri IV rencontre un paysan, qu'il prie de lui servir de guide.

 

Chemin faisant, le paysan dit au prince : « Monsieur, vous êtes sûrement un des premiers officiers du roi, je ne l'ai jamais vu. Ne pourrais-je pas, par votre bonne grâce, le voir aujourd'hui ? — Volontiers, dit Henri ; lorsque nous serons arrivés, tu n'auras qu'à te tenir à côté de moi, et parmi tous ceux qui approcheront, tu remarqueras celui qui aura le chapeau sur la tête ; ce sera le roi. »

 

Richard, personnage du fermier dans l’opéra Le Roi et le Fermier,

de Sedaine et Monsigny

 

Arrivé au lieu du rendez-vous, les courtisans, que l'absence du roi avaient mis dans l'inquiétude, s'empressèrent de l'aborder, le chapeau à la main. Henri, que le paysan continuait d'accompagner, le chapeau sur la tête, se retournant vers cet homme, lui dit : « Eh bien ! vois-tu qui est-ce qui est le roi ? — Ma foi monsieur, dit le paysan, c'est vous ou moi. »

 

Cette aventure fit le sujet d’un opéra-comique en 3 actes de Michel-Jean Sedaine (musique de Pierre-Alexandre Monsigny) intitulé le Roi et le Fermier, représenté pour la première fois en 1762.

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18 mai 2014 7 18 /05 /mai /2014 08:55

D'après « Joyeux passe-temps de la jeunesse », édition de 1864

 

Le duc de Mayenne, chef des Ligueurs, aimait beaucoup la bonne chère ; il passait à table tout le temps que son infatigable rival, Henri IV, le laissait tranquille. Rarement il en sortait sans avoir la tête échauffée, et c'est dans ces moments heureux qu'il battait en idée Henri IV, tandis que celui-ci le battait en réalité.

 

Le jour de la bataille d'Arques (21 septembre 1589), Mayenne dîna copieusement comme à son ordinaire ; on lui avait servi un melon excellent, et il se disposait à le manger, lorsqu'on vint l'avertir que la cavalerie de Henri IV s'était imprudemment avancée dans un taillis, où elle serait surprise et écrasée, s'il voulait en donner l'ordre ; que dès lors l'armée des Ligueurs pourrait à l'improviste se jeter sur le camp ennemi. « Un moment, dit Mayenne, laissez-moi achever mon melon. »

 

Henri IV à la bataille d'Arques le 21 septembre 1589

 

Peu d'instants après, un officier survient et lui fait un rapport semblable au premier. Même réponse : « Laissez-moi achever mon melon. » Enfin on lui annonce qu'on aperçoit l'armée ennemie, et qu'il n'a plus que le temps de monter à cheval. « J'ai fini », s'écrie-t-il avec un air de satisfaction. Il monte à cheval, mais il est complètement battu. Juste châtiment de son trop grand appétit pour le melon, ou plutôt de son intempérance et de son incurie.

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11 mai 2014 7 11 /05 /mai /2014 08:55

D'après « L'esprit des voleurs », paru en 1862

 

François Ier, s'étant égaré à la chasse, dans la forêt de Rambouillet, entra pour se reposer dans une maison isolée. Il y trouva quatre hommes qui faisaient mine de dormir et qui furent bientôt debout.

 

L'un d'eux dit au roi : « Tu as un bon feutre, je m'en empare. » Un autre : « Voilà une belle casaque : elle m'ira comme un gant. » Le troisième : « La superbe cotte blanche ! Le bel air que j'aurai ! » Le quatrième : « Moi, je me contenterai du cor de chasse. »

 

François Ier

 

Le sournois était loin d'y perdre, car il s'allouait en même temps une magnifique chaîne d'or. Il s'en saisissait, lorsque François Ier s'écria : « Permettez que je vous montre quelle vertu a ce cor. » Il en sonne et, à l'instant, accourent les officiers qui le cherchaient.

 

« Voici, leur dit-il, des gens qui ont songé que tout ce que j'avais était à eux. J'ai songé à mon tour qu'il fallait les envoyer au prévôt de Montfort-l'Amaury pour les empêcher de rêver. » Le soir du même jour, ils dormaient tous les quatre d'un sommeil exempt de rêves, la corde au cou.

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